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Un autre aspect qui donne une situation de lieu caractéristique à un texte est celui des noms propres qu’il contient, en référence aussi bien aux personnes qu’aux objects. Apparamment, la traduction de noms propres de personnes n’est pas un problème parce qu’à première vue, vous devriez dire qu’il s’agit d’un phénomène qui appartient au passé, alors que, par exemple, tous les noms des écrivains étaient adaptés au langage et à la culture cibles: par exemple, en Italien, Carlo Dickens, Leone Tolstoi, Gustavo Flaubert, Volfango Amedeo Mozart, etc.
Présentement, une telle pratique est encore partiellement en usage. Par exemple, l’écrivain Tolstoy est connu, dans la culture Anglaise Américaine, comme "Leo", qui n’est pas une traduction du nom original "Lev", qui signifie "lion", mais sa version onomastique, i.e. c’est le nom propre Anglais qui dérive de la même racine Latine de leo leonis.
Un phénomène analogue est noté dans l’épellation dans les pays de l’Ouest de certains noms qui appartiennent originalement à des alphabets non-Latins. Le nom Russe "Dmitrij" est quelquefois traduit par "Demeter", quelquefois il est adapté à la prononciation régionale, en devenant par exemple, Dmitri or Dmitry en Anglais (pour un orateur Anglais il est difficille de prononcer les sons de deux voyelles comme "ij"). De la même façon, le nom "Vasilij" est prononcé facilement, aussi bien en Anglais qu’en Italien qu’en Français, avec un doublage involontaire du "s", un tel doublage se réflète même dans l’épellation souvent adoptée particulièrement dans les éditions non-scientifiques: Vassily ou Vassili. De ce point de vue, l’attitude est dirigée vers l’adaptation, le comfort, malgré la justesse philologique.
Une description similaire peut être faite de la translittération ou de la transcription de l’Hébreu. Plusieurs mots communs dans un contexte non-Juif ont aussi, en caractéres Latins, des consonnes double qui en Hébreu n’existent pas. Voici quelques exemples d’un dictionnaire Anglais:
Mais dans cette attitude de prononciation amicale générale, au désavantage de la philologie, il y a de la consistence. Parce que dans d’autres cas il y a une insistance philologique exagérée lorsqu’elle est comparée à d’autres points faibles. Par exemple, nous connaissons tous le roman Anna Karenina, mais peut être que tous ne connaissent pas le nom de l’héroine. Dans n’importe quel langage de l’Ouest, ce serait "Karenin", i.e. le même que celui de son mari. En Français, en Allemand, en Italien, en Espagnol, en Anglais, ou les noms ne sont pas déclinés selon le genre, le titre du roman, s’il était inspiré du même critère d’acceptabilité – et non pas de suffisance – pourrait facilement être Anna Karenin.
Même s’il s’agit d’une science descriptive ou non prescriptive, la science de la traduction dicte, toutefois, une consistance intérieure dans les choix de traduction dans tout l’ensemble d’un texte (ou dans une série de textes). Il serait par conséquent désirable de s’en tenir à l’une ou à l’autre tendance.
Examinons des noms propres d’objets. Cette catégorie est souvent actualisée par:
des noms d’agences
des noms de cinémas, de théâtres
des noms de rues
À l’exception des agences internationales qui ont de multiples noms (par exemple Unione Europea, Union Européenne, European Union, Europäische Union etc.), la traduction du nom propre d’une agence peut créer de la confusion. Par exemple, la traduction de noms d’universités qui contiennent le nom d’un endroit (Université de la Californie, l’Université de Washington, Università degli Studi di Milano, Moskovskiju gosudarstvennyj universitet) peut être tendancieuse parce qu’en certains cas le nom de l’endroit fait référence à l’endroit ou l’université à son campus et dans d’autres cas c’est simplement une appellation. Par exemple, la traduction de l’"Université de Milan" pourrait créer de la confusion, parce qu’à Milan il y a plus de dix universités qui, si leurs noms étaient traduits, pourraient être adaptés dans une traduction Anglaise. La même chose peut être dite de l’Université de la Californie, qui, si une traduction littérale en est faite, donnerait l’idée (fausse) qu’en Californie il n’y a qu’une université. La traductiion de l’"Université de Washington" par "Universita di Washington" serait tout simplement une erreur: cet université n’est ni dans l’état de Washington ni à Washington, D.C., mais bien au Missouri.
Puis il y a des cas particuliers dans lesquels la traduction serait réellement ridicule. Puisque certains noms ont une signification au delà de leur signification en tant que noms propres, le paradoxe pourrait être réalisé dans lequel "Università Bocconi" de Milan, qui porte le nom de son fondateur, pourrait être traduit par l’"Université Mordée" ou l’"Université Bouchée", puisque "boccone" en Italien veut dire "mordée" ou "bouchée". C’est ce qui s’est produit sur le site officiel du gouvernement Italien, au cours de la traduction des biographies des ministres Italiens quand ils ont pris office en 2001.
Un important aspect en ce qui concerne les realia en général et les noms propres en particulier, qui est valable pour tous les traducteurs de toutes les combinaisons linguistiques, se lit comme suit: lorsqu’on se trouve devant un élément de realia ou d’un nom propre, la première question à se poser est: quelles sont les origines de la culture et du langage? Aprés avoir réglé cette question, le choix se situe entre:
1. transliteration ou transcription de l’épellation originale
- traduction ou adaptation de l’épellation originale
ce qui n’est pas permis est:
- transcription ou adaptation d’une épellation non-originale qui appartient à la langue/culture dans laquelle le texte est incidentellement écrit.
À titre d’exemple de cette troisième option indésirable, je choisis le roman de Martin Cruz Smith, Gorky Park, publié en Italien avec le même titre Anglais dans la traduction de Pier Francesco Paolini (qui, présumément, n’avait pas eu un rôle majeur dans la décision au sujet du titre, parce qu’ordinairement une telle tâche appartient au bureau de marketing d’un éditeur).
Le roman Américain se situe dans un parc d’amusement de Moscou, qui en Russe est appelé «Park imeni Gor´kogo». Par conséquent, Martin Cruz Smith a décidé légitimement de lui donner le nom de la version Anglaise, traduisant la dénomination Russe: Gorky Park.
L’éditeur Italien avait l’opportunité de faire:
- une translittération ou une transcription de l’épellation originale(«Park imeni Gor´kogo»)
- une traduction ou une adaptation de l’épellation originale («Parco Gor´kij»
Et a plutôt opté pour ce que je considère comme l’option qui n’est pas permise:
3. une transcription ou une adaptation de l’épellation non-originale appartenant au langage/culture dans lequel le texte est incidentellement écrit: alors le texte fut traduit par "Gorky Park", comme s’il y avait à New York ou dans une autre ville Américaine un parc nommé en l’honneur de l’écrivain Russe.
De cette façon un faux évident est créé, si ce n’est pas du point de vue littéraire, mais bien du point de vue de la localisation littéraire. On donne aux lecteurs l’illusion que quelque part dans le monde il existe un "Gorky Park" (en Anglais) ou, peut être que la trame du thriller n’e se situe pas en Russie.
L’éditeur Français a commis un faux encore plus complexe: en France le roman est connu sous le nom de Gorki Parc i.e. conservant la construction Anglaise dans laquelle le premier nom est une modification du second mais en traduisant "Park" par "Parc", en créant par conséquent un hybride dans lequel:
la construction est Anglaise
le langage assumé est le Français
le nom propre est originalement Russe (imaginez cela!)
Les Danois l’ont appelé «Gorkij Park» en adoptant l’épellation du nom Russe de l’écrivain, mais en laissant l’illusion que le parc porte ce nom (en Danois ou en Russe).
L’éditeur Finnois a fait un choix complètement légitime en le publiant comme Gorkin puisto, i.e. en traduisant le titre en Finnois.
La troisième partie de 40 sections de ce cours se termine ici, mais les sujets prévus dans la troisième partie n’ont pas été complètement traités. Les nombreux sujets à traiter en ce qui a trait à la production de textes traduits seront expliqués dans la quatrième partie, les prochaines 40 sections.
Bibliographie
MARÍAS J. Negra espalda del tiempo, Punto de lectura, 2000 (original edition 1998), ISBN 84-663-0007-7.
MARÍAS J. Dark Back of Time, New York, New Directions, 2001 (translated by Esther Allen), ISBN 0-8112-1466-4.