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24 – Innovation Technologique, Qualité, Résistance

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«lorsque nous sommes confrontés à un langage insensé ou insuffisant, comme si nous avions échoué à traduire le rêve dans sa version propre, nous avons respecté même ses défauts d’expression»1.

J’ai déjà consacré de l’espace aux tentatives qui ont été faites dans les années soixante pour créer des outils pour ce qu’on appelle la "traduction automatique"; c’était autrefois alors que le mythe du jumelage un pour un dans les codes linguistiques était encore recherché et que l’anisomorphisme des codes naturels n’était pas encore compris.

L’énergie et les ressources que les diverses initiatives impliquées ont consacré à ce domaine n’ont donné aucun résultat complet ni fiable, et la pratique de la traduction continue dans les mêmes sillons que par le passé. La contribution de la technologie de l’informatique a eu beaucoup plus d’importance pour le traducteur en n’automatisant pas la traduction mais plutôt en facilitant l’accès à la documentation nécessaire à la traduction.

Dans cette partie du cours de traduction nous avons revu plusieurs technologies utiles en ce sens. Mais si nous revisitons ce que nous avons examiné jusqu’à maintenant, pouvons nous dire que de traduire avec ces outils constitue une sorte d’automation? Je dirais que non, nous ne le pouvons pas. Nous pouvons nous consoler en pensant qu’au moins, ces outils accélèrent la tâche du traducteur et la rendent moins ardue.

Mais est-ce que c’est bien le cas?

Nous ne pouvons pas donner une réponse générale. Dans l’ensemble nous pouvons difficillement répondre par un simple oui.

Par exemple lorsque je compare la possibilité de trouver des textes de référence (quels qu’ils soient) sur l’internet versus la nécessité de me rendre physiquement à une bibliothèque pour chercher le livre dont j’ai besoin, le prendre, le feuilleter jusqu’à ce que j’aie trouvé la documentation requise et revenir au travail, il est bien clair que la recherche sur l’internet est énormément plus rapide et plus facile. Mais dans l’ensemble il existe plusieurs formes de contrôle de la qualité qui sont maintenant plus rapide, et qui ne pouvaient même pas être imaginable auparavent. La traduction produite de nos jours est souvent non seulement le simple résultat d’un travail plus rapide, mais est aussi le résultat d’un processus qui est de beaucoup plus élevé qualitativement.

Par exemple si vous aviez besoin d’une citation de la Bible par hasard, il vous fallait rechercher le passage et puis le rechercher à nouveau dans l’édition de la culture cible, mais il était bien évident que le traducteur se limitait à une seule édition, et pour une seule citation il ne se rendait pas à librairie pour faire une anlyse comparative de ce passage dans toutes les versions existantes dans la culture source et dans la culture cible : le fait même d’avoir trouvé le passage était considéré comme un bon niveau de documentation.

 

Maintenant avec une dépense d’énergie beaucoup moindre je peux non seulement trouver toutes les éditions du passage de la Bible dont j’ai besoin, mais aussi choisir celui qui convient le mieux, celui dans lequel la signification que l’auteur du prototexte avait l’intention de communiquer est exprimée de la façon la plus claire. Si maintenant la simple opération de trouver l’information est en moyenne plus rapide, il est aussi vrai que les opérations nécessaires pour extraire l’information sont beaucoup plus nombreuses parce que ni le traducteur ni le client ne sauraient maintenant se satisfaire uniquement de ce qui semble une documentation approximative.

La même situation est valide pour la terminologie. Autrefois si vous possédiez un dictionnaire ou un glossaire terminologique particulier on vous considérait comme étant bien outillé, maintenant l’omission d’une consultation des bases de données terminologiques de l’internet serait considérée telle une omission impardonnable.

S’il me fallait faire la synthèse des conséquences de l’introduction de la technologie récente en traduction, je dirais que le travail du traducteur est plus complexe, il n’est plus acceptable que le traducteur, en raison des ses goûts ou de ses caprices, refuse d’utiliser la technologie dans quelque domaine que ce soit. Le travail de traduction est devenu beaucoup plus documentable et documenté parce que les canaux grandissants de la communication et de l’information engendrent une demande accrue d’informatisation, et les traducteurs qui ne peuvent être à la hauteur sont identifiés et éliminés du marché.

Ceci est aussi vrai pour les traductions d’éditions et les traductions littéraires en particulier. Toute information au sujet des collocations, des lexiques, des structures, des dislocations, et de façon plus générale le marquage des énoncés concerne particulièrement les aspects du style des traductions d’œuvres de fiction et d’essais, surtout ce qu’on appelle "l’écriture d’essais de haut niveau", souvent écrits par de auteurs de fiction.

L’existence du phénomène de la "résistance" et du consevatisme est plus que naturel et compréhensible. Au cours de deux dernières décades j’ai constaté que plusieurs collègues sont passés d’une position de scepticisme radical et d’hostilité – i.e. envers l’ordinateur – à son utilisation.

Des personnes qui n’étaient pas convaincues, ont été forcées de modifier leur comportement par la force d’évènements historiques et économiques. La même chose s’est produite dans le cas de l’internet. Au départ les traducteurs qui "utilisaient l’internet" étaient considérés comme des fanatiques de la technologie qui étaient prêts à l’utiliser coûte que coûte "même" dans des domaines complètement étrangers à la traduction. Et les principaux opposants que je connaissais étaient des traducteurs littéraires. Peut être que la collocation de leurs textes à la frontière de la société, ou mieux dit, à l’extrémité plus élevée, où les consommateurs sont plus rafinés, les a induits à imaginer que même leurs tours d’ivoire avaient besoins de canaux, de câbles, de branchements, d’antennes de satellites et de tous les autres détails techniques impliqués dans une connection électronique avec le reste du monde.

Le paradoxe de l’innovation technologique du processus de traduction est que, au lieu d’impliquer de la vitesse, elle a amené de la lenteur. Au lieu de simplifier le processus, elle l’a rendu encore plus complexe. Au lieu de minimiser le temps de travail, elle peut l’avoir augmenter.

En contraste, le plus grand bénéfice d’un processus aussi novateur est la qualité. La qualité de la traduction – si elle n’est pas en termes de produit effectif, au moins elle l’est en termes de produit potentiellement productible – a augmenté. C’est la tendance dans la plupart des domaines.

Il est vrai que vous pouvez trouver des modes d’emploi pour l’usage de produits qui ne sont pas mal traduits parce qu’ils ne peuvent pas être considérés comme des "textes" au sens propre du terme. Ils ont été produits par des programmes de traduction automatiques qui ont substitué le prototexte mot par mot d’une manière plus ou moins désinvolte et en ont fait un fatras de mots dans la culture cible qui n’est même pas lisible. Ce sont des choix extrêmes qui caractérisent le marché de bas de ligne (je fais référence au marché et à des produits avec des modes d’emploi traduits et aux traductions). Par exemple, le paragraphe précédent souligné en rouge serait traduit de la façon suivante :

ed allineare quello capito al imbattersi nelle istruzioni per l'uso dei prodotti che non possono dirsi tradurre male, perché non può appena essere considerato testimoni nel senso. and true that understood to imbattersi in instructions for the use of products that cannot dirsi badly translate, perche cannot just not be considered witnesses in sense.

Ces exceptions confirment vraiment la règle : la traduction avec la nouvelle technologie n’est pas plus rapide.

Dans les prochaines sections nous examinerons les outils les plus récents que les traducteurs ont à leur disposition : les mémoires de la traduction.

 

Bibliographie

FREUD SIGMUND, L’interpretazione dei sogni, in Opere, vol. 3, Torino, Boringhieri, a cura di C. L. Musatti, 1966.

FREUD SIGMUND, The Interpretation Of Dreams, translated by A. A. Brill, London, G. Allen & company, 1913.

CHAMPOLLION YVES Wordfast, disponibile nel world wide web all’indirizzo www.wordfast.org, consultato il 23 maggio 2004.

Systran. Information and translation technologies, disponibile nel world wide web all’indirizzo http://www.systransoft.com, consultato il 23 maggio 2004.


1 Freud 1900: 446.


 



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